Soum, Alma, Lam et leurs parents vivent au cœur d'une vallée fermée par des falaises, en Afrique. Un endroit reculé de tout. Pourtant, un cheval apparaît. Alma et Lam l'apprivoisent. Si ce cheval a réussi à venir, c'est qu'un ailleurs existe. Lam est donc bien décidé à le découvrir. Lorsqu'elle s'aperçoit de la disparition de son petit frère et du cheval, Alma part à leur recherche. Sentant ses enfants en grand danger, leur père Mosi est contraint de laisser seuls sa femme enceinte et leur fils ainé muet pour les retrouver.
Pendant ce temps, à Lisbonne, un navire de traite négrière, la Douce Amélie appareille. Joseph Mars, un garçon de quatorze ans environ embarque clandestinement, bien décidé à dénicher un fabuleux trésor. Joseph compte sur le temps de voyage pour fureter partout sur le navire. Direction les côtes de l'Afrique pour remplir les cales de captifs...
Citations "Les captifs se tiennent les uns aux autres sous la pluie. Leurs yeux se tournent vers la terre. La plupart n'ont jamais vu la mer. Les rouleaux se brisent et les empêchent de grimper. Ils sentent encore le sol sous eux. Leurs pieds s'enfoncent et dérapent dans le sable, sous l'eau. Ils sont encore là. Parfois, ils profitent de celui qui tombe et auquel ils sont attachés pour revenir en arrière, pour s'attarder un peu sur la terre. Alors on les tire de l'intérieur avec force. Leurs pieds glissent. Ils sont arrachés. Ils ne sentent plus rien sous eux.
Ils sont poussés au fond des pirogues.
C'est fini.
La lisière blanche de leur continent commence à s'éloigner. Entre les arbres, ils croient voir briller des lucioles par millions : les yeux de leurs ancêtres qui les regardent partir.
Sur les pirogues, certains veulent se jeter à l'eau.
Le danger des requins n'est rien à côté de l'incertitude absolue.
Où allons-nous ? Que vont-ils faire de nous ?
La Douce Amélie apparaît, brillante de pluie. On lui a remis ses mâts immenses. Un peu de lumière rose éclaire enfin la mer. Dernière lueur avant que tout s'éteigne dans les ténèbres de l'entrepont." p. 218
L'avis d'Histoire d'en lire
Dix ans après les deux tomes de Vango, Timothée de Fombelle est de retour avec le premier tome d'une trilogie sur le thème de la traite négrière au XVIIIe siècle.
Le commerce triangulaire
L'intrigue de la série Alma et son premier tome Le Vent se lève se déroule en 1786, sous le règne de Louis XVI, bien que le nom du monarque ne soit pas mentionné.
Le commerce triangulaire ou autrement appelé la traite des Noirs est pratiqué depuis le XVIe siècle, entre l'Europe, l'Afrique et l'Amérique. La France achète ainsi des captifs en Afrique pour les revendre sur l'île de Saint-Domingue, colonie française de 1697 à 1804, pour ramener ensuite du café, du sucre, du cacao, dont raffolent les nobles de Versailles ! Le roman développe largement ce principe de la traite négrière, la capture des hommes, femmes et enfants noirs chez eux, sur leurs terres, leur embarquement sur les navires marchands comme de vulgaires objets, leurs conditions de vie, de survie même terribles à fond de cale avec une maigre nourriture, entassés, avec peu d'air pour respirer convenablement, sans voir la lumière du jour une bonne partie du temps.
Le capitaine Gardel est l'exemple typique de l'homme dur envers cette "marchandise" mais qui sait aussi qu'il doit faire suffisamment attention pour revendre au meilleur prix ses captifs une fois arrivé à Saint-Domingue.
Un roman d'aventure
Roman historique par son sujet sur l'esclavage au XVIIIe siècle, Le Vent se lève est aussi un roman d'aventures.
Nous rencontrons la jeune Alma et sa famille dès le premier chapitre. Tous semblent vivre paisiblement à l'écart de tout. Alma et son jeune frère Lam aiment passer du temps auprès de Brouillard, qu'ils pensent être un zèbre sans rayure et qu'ils ont découvert un an plus tôt. Mais Lam a compris que le monde ne se limitait pas à leur vallée et sans le savoir, il entraine à sa suite sa sœur et leur père fou d'inquiétude. Bien évidemment, de nombreux obstacles se dressent sur leur chemin et petit à petit, nous voyons leur destin rejoindre celui des captifs de la traite négrière...
Nao, leur mère et Soum, restent chez eux mais pour combien de temps ? Chaque personnage se retrouve pris de son plein gré ou malgré lui au cœur cette aventure, de sa vallée africaine aux côtes du continent, et pour un voyage sur l'océan en direction de l'Amérique.
Timothée de Fombelle a choisi de rester sur une narration omnisciente pour alterner les points de vue avec Alma, son père Mosi, à bord du navire La Douce Amélie... Une manière judicieuse de voir ensuite les liens se tisser entre les personnages, les lieux et l'on comprend qu'il sera difficile d'échapper à la force et à la puissance des esclavagistes.
Une manière de garder un suspense autour de différentes histoires : celle d'Alma, celle de Joseph Mars, celles de Cook ou Poussin...
Un roman écrit comme un conte Roman historique, roman d'aventures, Le Vent se lève est écrit comme un conte. J'ai été décontenancée au départ par l'emploi du présent de l'indicatif, bien qu'aucun élément ne précise alors qu'il s'agit d'un roman historique. Pourtant, passées quelques pages, on se laisse emporter par cette narration, ce style d'écriture très rythmé et quelques touches de fantastique viennent s'ajouter à la réalité historique.
Le Vent se lève offre un début passionnant à cette série. François Place nous gratifie de superbes dessins, nous immergeant complètement dans ce terrible passé. Les pages défilent, on en redemande.
L'auteur a su trouver un parfait équilibre entre les différents éléments de son livre, le contexte est bien ancré pour s'en faire une très bonne idée, on suit avec beaucoup d'attention l'évolution des différents personnages et au dernier mot de la dernière page, on n'a qu'une envie : lire la suite !
Note : Le Vent se lève a reçu le Prix France Télévisions Roman Jeunesse 2020 et le Prix Gulli du Roman 2020.