31 décembre 1933, à Cologne, en Allemagne. Toute la famille Mendel est réunie pour célébrer le réveillon du Nouvel An. Mais sans doute les uns et les autres ne se reverront-ils pas avant un long moment. Depuis son arrivée au pouvoir, le chancelier Hitler promulgue chaque jour de nouvelles lois antisémites. Alexander, le propriétaire de la Buchhandlung Mendel de Cologne, fait le choix de partir en France avec son épouse et sa fille. Il confie la librairie aux bons soins d'Hans Shreiber, 22 ans, qui y travaille depuis plusieurs années. Le jeune homme parviendra-t-il à sauver la librairie du nazisme ?
Citations "Voilà les différents espaces dont Hans devient le maître à seulement vingt-deux ans. Alexander l'a jugé digne de cette mission. Il lui a appris tout ce qu'il doit savoir pour la mener à bien jusqu'à son retour.
Le jeune homme devra poursuivre les activités régulières qui faisaient la notoriété de la Buchhandlung Mendel en gardant l'esprit d'Alexander : "Le livre est un être vivant, c'est à nous de lui donner la possibilité d'exister."
Lors des vernissages, Alexander invitait sans discernement notables de la ville et simples habitués. Dans une ambiance sympathique, tous ses clients se mélangeaient pour son plus grand plaisir. "Seules la culture et la beauté peuvent briser les barrières sociales, n'oublie jamais cela, Hans !"
Alexander avait une confiance aveugle en l'homme." p. 32 "Je dois continuer à proposer des livres aux lecteurs de la Buchhandlung Mendel, même s'ils sont peu nombreux, même si leurs préoccupations sont ailleurs. Cette guerre finira bien un jour... Les nazis disparaitront et les Mendel reviendront. Ils reviendront, assène-t-il avec une certaine hargne. Les livres ne céderont pas devant la guerre ! Je continuerai à diffuser la pensée des auteurs. Trois mille cinq cents ouvrages, c'est peu, mais je suis fier de ces rescapés. Ils sont bien suffisants pour faire vivre une librairie..." p. 173
L'avis d'Histoire d'en lire
Avec Le Libraire de Cologne, Catherine Ganz-Muller signe un roman pour adolescents et jeunes adultes, remarqué et absolument remarquable !
Le contexte : la montée du nazisme et la Seconde Guerre mondiale
Tout commence le 31 décembre 1933. Cette année est fondamentale puisqu'elle a vu arriver au pouvoir Adolf Hitler le 30 janvier 1933. Même si le roman ne démarre qu'au dernier jour de cette année, la scène chez les Mendel pour le réveillon est éloquente. Les Mendel sont des juifs allemands. La progression du nazisme a été rapide et au terme de cette année, chacun doit faire un choix : partir ou rester. Malgré sa passion pour sa librairie, Alexander Mendel fait le choix de sauver sa vie et part avec sa femme et sa fille, en France, à Paris.
La librairie de Cologne
Comme elle le précise dans un mot à la fin du roman, Catherine Ganz-Muller s'est inspirée de la véritable histoire de la librairie Lengfeld de Cologne. Dans le roman, Alexander Mendel confie sa librairie au jeune homme qui travaille pour lui depuis qu'il a 15 ans, Hans Schreiber. Hans n'est pas juif et tout deux espèrent donc permettre la continuité de la librairie grâce à cela. Et le but étant qu'Alexander retrouve son commerce à la fin de la guerre.
A travers une narration omnisciente, nous suivons à la fois Hans au cœur de cette guerre, le contexte historique et le lien avec la famille Mendel partie en France grâce à quelques courriers échangés entre Liese et Hans.
La littérature comme arme de résistance
Très rapidement, le nazisme impose sa vision à la population allemande, avant de s'étendre au reste de l'Europe. Les mesures antisémites se durcissent, à l'image de la Nuit de Cristal qui se déroule dans la nuit du 9 au 10 novembre 1938 et pendant laquelle les commerces, lieux religieux juifs sont détruits et de nombreux Juifs massacrés. La Buchhandlung Mendel est de ceux-là.
Hans a fait preuve de beaucoup de courage, malgré les menaces, les passages des nazis, leur pillage. A l'aide de voisins, il va continuer coûte que coûte d'ouvrir la librairie, affichant clairement l'importance de la lecture, rempart contre la violence nazie et se protégeant des livres imposés par le parti. Le livre est clairement son arme de résistance, le fil conducteur du roman.
Nombreux sont les romans sur la Seconde Guerre mondiale, mais plus rares sont ceux qui se déroulent uniquement en Allemagne, au cœur du pays qui a déclaré la guerre et qui nous montre autant à voir la virulence du nazisme que des actes de résistance par des Allemands !
Catherine Ganz-Muller nous invite à suivre la chronologie des événements, en focalisant sur le personnage de Hans. Même s'il n'est pas le narrateur, l'écriture de l'autrice nous permet d'être au plus près de lui et de ressentir ses émotions. C'est un roman d'une grande force, un sujet passionnant surtout quand on est un.e amoureux.se des livres ! Et je trouve qu'il a même une portée universelle, puisque la pensée librement diffusée est effectivement la meilleure arme à la violence, aux extrémismes.
Un coup de cœur !
Note :Le Libraire de Cologne a reçu le Grand Prix SGDL (Société des Gens de Lettres) du Roman Jeunesse 2021.