Vienne, 1938. Déjà, à ce moment, la vie de Lisa Jura, de ses sœurs et de ses parents est bousculée. C'est une famille juive, comme tant d'autres en Autriche. Or, les nouvelles sont de plus en plus inquiétantes. Hitler, le chancelier allemand, est en train d'annexer des territoires. Et surtout, il entend se débarrasser des Juifs. Cela commence avec la Nuit de Cristal à Vienne. Âgée de 14 ans, Lisa n'oubliera jamais l'image de son père, nu dans la neige, battu par un Nazi. Peu de temps après, ses parents préparent le départ d'une de leurs filles. Une vaste opération, le Kindertransport, permet à des milliers d'enfants de rejoindre l'Angleterre en train. C'est Lisa qui obtient une place. Avant de partir, sa mère Malka lui fait promettre de persister dans la musique, qu'elle sera toujours son refuge. Lisa doit être courageuse et espère fortement que ses sœurs pourront vite la rejoindre.
Grâce au talent de sa mère, Lisa est elle aussi un petit prodige du piano. Vienne est tout de même la ville de génies de la musique tels que Mozart, Beethoven, Schubert ou encore Liszt. Lisa "baigne" dans cette musique classique depuis qu'elle est née.
Une fois en Angleterre, Lisa peine à trouver sa place. Elle finit par rester au foyer pour enfants réfugiés du 243 Willesden Lane. La guerre est en marche. Loin de sa famille, il faut vivre avec le couvre-feu, les bombardements, les restrictions. Mais Lisa puise une force et un courage incroyable grâce à la musique, encouragée par les autres membres du foyer.
L'avis d'Histoire d'en lire
Mona Golabek, l'autrice de ce témoignage, car c'est bien de cela qu'il s'agit, est la fille de Lisa Jura. 75 ans plus tard, elle nous raconte le vécu de sa mère et de sa famille pendant toute la Seconde Guerre mondiale.
Ce texte est bien sûr un témoignage historique. Mais Mona Golabek a fait le choix de ne retranscrire que le contexte, sans trop entrer dans les détails. Elle ne veut en aucun cas faire un roman historique sur la Seconde Guerre mondiale. Non, en tant que fille du personnage principal, Mona Golabek nous transmet un hymne à la vie. Car malgré toutes les horreurs, les crimes qui ont eu lieu pendant cette guerre, il y avait ceux qui se battaient pour vivre, qui ont sauvé des milliers d'enfants, qui ont essayé de garder certaines habitudes malgré la terreur ambiante. Outre le vécu de Lisa Jura, Les Enfants de Willesden Lane est un hommage à toutes ces personnes.
Le Kindertransport reste encore méconnu en ce qui concerne la Seconde Guerre mondiale. C'est une formidable organisation et coopération qui a permis à des milliers d'enfants d'échapper à une mort certaine. Mona Golabek ne rentre pas forcément dans les détails mais on comprend suffisamment le principe général.
A côté de cela, c'est bien l'histoire tellement incroyable et particulière de Lisa Jura, cette adolescente qu'on suit de ses 14 ans à son entrée dans l'âge adulte. Lisa est originaire de Vienne, la patrie des plus grands pianistes et compositeurs. Sa mère lui transmet sa passion du piano dès sa petite enfance. Lisa grandit en jouant les plus grandes œuvres. Alors que survient la séparation d'avec sa famille, Lisa promet à sa mère de se donner à la musique et de ne jamais abandonner. Mona Golabek nous livre avec une grande émotion la destinée de Lisa. Les termes musicaux, la force des morceaux que joue Lisa viennent surpasser les horreurs de la guerre. Lisa plaque avec force et ferveur des notes et des accords pour atténuer le bruit des bombardements. Lisa ne fait pas que jouer de la musique, elle-même et son auditoire sont transportés dans d'autres mondes où la guerre n'existe plus, où chacun peut retrouver celui ou celle qu'il a perdu. C'est un véritable hymne à la vie, comme le mentionne le sous-titre du livre : "Un témoignage sur la musique, l'amour et la survie". Qu'on connaisse ou non les morceaux que joue Lisa, on est nous aussi transporté dans cet univers, on ressent toute la passion qui se dégage de cette jeune fille, on pense à toutes ces victimes innocentes de cette guerre. Mais malgré tout ces horreurs, et Lisa a elle-même perdu ses parents, la musique est là pour redonner espoir, pour dire à chacun que la vie continue, qu'il y a de l'amour à donner, des fêtes à faire... Mona Golabek utilise les mots avec justesse, comme une partition de musique. Tout est tout simplement précis et nous prend aux tripes.
Les romans sur la Seconde Guerre mondiale sont nombreux mais Les Enfants de Willesden Lane sort largement du lot. Ici, il ne s'agit pas de détailler les atrocités d'Hitler, nous les connaissons déjà. C'est un témoignage qui se veut optimiste, malgré les souffrances endurées par les uns et les autres. Un coup de cœur !