Le 28 juin 1914, l'archiduc autrichien François-Ferdinand et sa femme sont assassinés à Sarajevo par Gavrilo Princip, un étudiant serbe. Déjà la guerre est en marche, les coalitions se forment. En France, il y a plusieurs camps. Il y a ceux qui veulent prendre leur revanche, récupérer l'Alsace et la Lorraine. Et il y a les autres, comme Jean Jaurès, les pacifistes qui essaient d'empêcher ce conflit par tous les moyens. Jean Jaurès est du côté du petit peuple, des prolétaires mais il veut une révolution pacifique, par la grève, par la mobilisation, plutôt que par les armes. En rédigeant quotidiennement l'édito du journal L'Humanité, il essaie de convaincre les foules. Mais pour que la mobilisation soit efficace et parvienne à enrayer la guerre, il faut qu'elle dépasse les frontières.
A côté de cela, il y a justement ces jeunes, ces hommes et ces femmes qui choisissent leur camp. Paul, 15 ans, rencontre Jaurès grâce à son beau-père. Lui non plus ne veut pas la guerre. Il veut pouvoir aller loin, très loin, emmener Madeleine jusqu'en Amérique. Cette jeune fille de 16 ans qui habite le quartier bourgeois. Ils ne se connaissent pas du tout, lui passe seulement son temps à l'épier sous sa fenêtre, chaque soir. C'est un amour impossible mais grâce aux idéaux de Jaurès, il y croit. Et parallèlement, Jaurès se nourrit de l'amour, de la souffrance de ceux qui l'entourent et le soutiennent.
L'avis d'Histoire d'en lire
Dans ce magnifique roman, Tania Sollogoub nous raconte la genèse de la Première Guerre mondiale. Et tout se passe pendant l'été 1914 : du 28 juin, jour de l'assassinat de l'archiduc autrichien François-Ferdinand au 31 juillet, jour de l'assassinat de Jaurès. Un mois très intense où les événements se sont très vite accélérés, de la Serbie jusqu'en Europe. L'autrice décrit avec précision l'engrenage de la machine de guerre. Il suffit de quelques hommes bien placés, de circonstances favorables et alors plus rien ne peut arrêter la mobilisation, même pas les hommes tels que Jaurès qui donnent leur vie pour combattre pacifiquement ces décisions.
Comme elle l'explique en note à la fin du livre, Tania Sollogoub s'est longuement plongée dans la vie de Jean Jaurès, sa vie personnelle bien sûr mais aussi et surtout sa vie politique. Et à la lecture du roman, on ressent parfaitement cette passion qu'elle a elle-même éprouvée en découvrant ainsi cet homme hors du commun. Il n'est pas bien grand, physiquement quelconque mais c'est un orateur étonnant. Il a redonné ses lettres de noblesse à la politique, tout le temps qu'il s'y est impliqué. Jean Jaurès a été et restera une figure marquante de ces jours précédant la Grande Guerre. Bien sûr, il dérangeait. Son assassinat est le dernier élément qui montre l'inéluctabilité de la guerre.
Les autres personnages ont aussi leur importance. Tania Sollogoub a récréé l'univers de Jaurès avec ceux qui l'ont effectivement côtoyé pendant ce mois décisif. Ils montrent les deux camps en train de se former. Ceux qui restent fidèles à Jaurès le nourrissent de leur amour, comme Paul ; de leur souffrance et de leur courage, comme Suzanne. Ce sont tout simplement des histoires personnelles émouvantes.
Un ouvrage exceptionnel sur une période historique toujours abordée trop rapidement en littérature jeunesse.