Agée de 21 ans en 1934, Charlotte Delbo rencontre à Paris Georges Dudach, un jeune homme qu'elle épouse deux ans plus tard. Sténodactylo, Charlotte est membre des Jeunesses Communistes, tout comme George qui y est très actif. L'arrivée au pouvoir du Front Populaire en 1936 amène des progrès sociaux considérables : congés payés, semaine de 40 heures. Pourtant, à la même époque, la France est cernée par des dictatures. En 1939, la guerre éclate. Georges est mobilisé. Pendant ce temps, à côté de son travail au théâtre auprès du grand Louis Jouvet, Charlotte œuvre clandestinement dans la Résistance. Après l'armistice de 1940, Georges est démobilisé. Mais le couple est sur ses gardes. Malgré toutes les précautions, leur groupe de résistants tombe. Georges est fusillé au Mont-Valérien. Le 24 janvier 1943, Charlotte et plusieurs centaines d'autres femmes sont déportées vers l'Est, aux camps d'Auschwitz-Birkenau, puis Ravensbrück. S'ensuit une longue et éprouvante période de souffrances et d'horreurs. Comment survivre dans cet enfer alors que tant d'amies meurent chaque jour ? Charlotte puise en elle une force incroyable pour survivre et témoigne largement de son vécu en déportation dans ses œuvres poétiques et théâtrales.
L'avis d'Histoire d'en lire
Rolande Causse avait déjà retracé le parcours exceptionnel d'un personnage ayant été déporté, Janusz Korczak dans la même collection aux éditions Oskar. Ici, elle reconstitue avec finesse, émotion, force et poésie le vécu de Charlotte Delbo dans les camps de concentration.
L'auteure commence son œuvre en partant de la rencontre entre Charlotte et celui qui devient son mari, Georges Dudach. Nous sommes en 1934, soit un an après l'arrivée au pouvoir d'Hitler en Allemagne. Et déjà, la tension est palpable en France. Charlotte et Georges sont de ceux qui sentent déjà qu'une menace plane. Et ce n'est pas la seule puisque petit à petit, la France est cernée par plusieurs dictatures. Nous suivons leurs actions au sein des Jeunesses Communistes, le réseau de Résistance qui se met en place, avec en parallèle, un rappel permanent du contexte, du danger encouru.
L'intensité dramatique croit encore avec la mort de Georges, fusillé au Mont-Valérien, puis la déportation de Charlotte et de deux cent trente compagnes vers les camps allemands. La jeune femme n'est plus que l'ombre d'elle-même dans ces conditions de survie épouvantables. Crument et durement, Rolande Causse redit la réalité de ces camps, lieux de souffrances, d'horreurs, de morts. Chaque description nous bouscule, parce qu'il est fondamental de ne jamais oublier.
Et à sa façon, Charlotte Delbo a raconté l'indicible. La poésie et le théâtre ont été son exutoire pour témoigner de ces années terribles. Elle a laissé une œuvre majeure, témoignant de son vécu et rendant un vibrant hommage à celles qui étaient auprès d'elle. C'est ainsi que Rolande Causse termine ce document, avec plusieurs chapitres consacrés aux poésies et pièces de théâtre marquantes de Charlotte Delbo.
Formidable ouvrage sur le devoir de mémoire et cette auteure de la déportation.