Accompagnée de Joseph Mars, Alma explore sans relâche toutes les plantations de Saint-Domingue à la Nouvelle-Orléans, Elle est fermement décidée à retrouver son petit frère Lam dont elle sent la présence. Joseph, lui, veut retrouver La Douce Amélie et le précieux butin que ce navire négrier renferme. Leurs chemins se séparent donc, chacun étant porté par sa propre quête. Malgré ces itinéraires très différents, ils espèrent se retrouver un jour.
Citations "- Ne t'éloigne jamais, dit Luc à Alma en revenant vers le bac.
Il se force à continuer de sourire. Les hommes les suivent des yeux.
- Ici, tout est dangereux pour toi.
- Je n'ai pas peur, dit Alma. Je dois trouver mon frère.
- Je t'ai dit que je t'aiderais.
- Alors jetez-moi dans un bateau vers la Louisiane. Qu'est-ce qu'il y a de plus important ?
Alma n'a aucune idée de ce qu'est un trésor. Elle entend le pirate et Jo répéter ce mot. Ca ne vaudra jamais un homme abandonné dans son sang dans une cour, ni un petit frère qui l'attend quelque part. " p. 54-55
L'avis d'Histoire d'en lire
Il a fallu attendre plus d'un an pour poursuivre les aventures d'Alma. Après un premier tome coup de cœur, distingué par de très nombreux prix et critiques, cette suite était attendue avec impatience.
Un conte entre Amériques et Europe Alma : L'Enchanteuse reprend évidemment le type de narration du précédent tome Le Vent se lève. Bien que le récit se déroule au XVIIIe siècle, il est écrit au présent. Et Timothée de Fombelle poursuit les aventures d'Alma sous forme de conte. Il se permet de rompre la chronologie des événements pour, par exemple, revenir sur le passé d'un personnage et apporter des éléments qui permettent de le comprendre au moment où les faits se déroulent. Tout est intégré au récit, le lecteur ne se perd pas en flashbacks et reste attentif aux nombreux détails qui sont amenés.
Et c'est ainsi qu'on passe d'un continent à l'autre au gré de tous ces personnages que nous suivons : Alma bien sûr, Joseph Mars, Nao, Amélie Bassac, Jean Saint-Ange, Gabriel Cook, Cortès... Les destins se suivent, se croisent, s'éloignent, se rejoignent dans un ballet savamment orchestré. Selon les parcours des uns et des autres, nous sommes tantôt à Saint-Domingue, tantôt en Angleterre, tantôt à La Rochelle. On pourrait croire que tant de distance entre eux rompt les liens. Bien au contraire, le conteur déroule son fil petit à petit et raccroche tous ces éléments. Il y a ceux qui recherchent les proches perdus et d'autres avides d'un trésor qui a peut-être coulé avec le navire négrier qui le transportait.
L'esclavage au XVIIIe siècle
Alors que le premier tome s'était concentré sur l'organisation même de la traite négrière entre l'Afrique, l'Amérique et l'Europe, ce second tome développe les réalités de l'esclavage une fois que les esclaves ont rejoint les plantations pour lesquelles ils ont été vendus. Hommes et femmes travaillent du petit matin jusque tard le soir dans les champs de canne à sucre, de café ou de coton. Un travail harassant, en plein soleil. Les mères sont contraintes d'amener leurs nouveaux-nés et de les nourrir comme elles le peuvent.
Et pendant ce temps, les riches propriétaires blancs sont continuellement en quête des meilleurs rendements pour augmenter leurs bénéfices.
À côté de cette dure réalité, ce second opus aborde quelque chose de nouveau : en 1787 émerge petit à petit l'idée d'une abolition de l'esclavage, tout du moins en Angleterre, avec une figure importante à retenir, celle de Thomas Clarkson. L'homme est influent et compte bien diffuser ses idées ailleurs et notamment en France. À peine plus tard, début mai 1789, le roi Louis XVI convoque les États généraux à Versailles. La situation est de plus en plus critique dans le royaume et les derniers chapitres du roman rendent bien compte de ce pouvoir royal qui ne convainc plus.
Alma, elle-même, se rendra à la cour de Versailles et chantera devant le roi et la reine. Son chant, sa marque oko, émerveille quiconque l'entend et c'est ainsi qu'elle espère retrouver les siens, grâce à cette voix puissante, envoûtante.