Sarah Lichtsztejn et ses parents ont fui les pogroms en Pologne et se sont installés en France, pensant échapper à la violence envers les Juifs. Le père de Sarah s'est enfui du camp allemand où il était prisonnier. L'adolescente et sa mère deux tentent de rester discrètes mais le 16 juillet 1942, elles sont raflées par la police française qui les conduit comme des centaines d'autres Juifs, hommes, femmes et enfants au Vélodrome d'Hiver. Elles parviennent à s'en échapper et se cachent tant bien que mal dans la capitale. Mais le 24 mai 1944, elles sont de nouveau arrêtées, en possession de faux papiers d'identité. D'abord internées à Drancy, elles sont déportées le 30 mai au camp de concentration de Birkenau-Auschwitz.
Citations "Je me lève d'un bond et me précipite dans les bras de Mme Bardou.
- Oh ! Madame, s'il vous plaît, sortez-nous de là. Dites-leur que nous sommes des braves gens. Qu'on n'a jamais fait de mal à personne. S'il vous plaît ! Vous n'êtes pas Juive, ils vont vous écouter vous !
- Malheureusement, Sarah, j'ai bien peur que non. Mais mon mari est allé au Commissariat général aux questions juives, place des Petits-Pères. Il connait un des employés. Alors, il faut espérer, Sarah.[...]
Avant même que je puisse la remercier, le gendarme et l'inspecteur brun saisissent Mme Bardou chacun par un bras, lui font faire demi-tour et l'expulsent de la salle sans ménagement.
Je rejoins ma mère que l'inspecteur blond a empêché de bouger. Les larmes aux yeux, je m'assois à côté d'elle.
- J'ai tout entendu, ma Sourélé ! me dit-elle, en me caressant la tête. La maman de Violette a raison : il ne faut pas perdre espoir.
Puis se tournant vers le flic, droit dans les yeux, elle siffle :
- Toi, tu avais notre destin entre tes mains. Tu pouvais nous laisser nous enfuir dans le métro, ou laisser partir ma fille quand elle est allée téléphoner. Mais tu es aussi lâche et mauvais que ton collègue ! Alors sache-le, je me souviendrai de toi.
L'inspecteur baisse la tête et ne répond pas." p. 62-63
L'avis d'Histoire d'en lire
Après l'histoire vraie de L'Enfant d'Oradour, Régis Delpeuch s'inspire d'un autre vécu, celui de Maria et Sarah Lichtsztejn, une mère et sa fille juives polonaises, plongées au cœur de l'horreur nazie.
La collaboration française
Le roman commence le 16 juillet 1942, au moment de la grande rafle du Vél d'Hiv. Maria et sa fille Sarah sont emmenées comme bien d'autres. Narratrice du roman, Sarah, alors âgée de quatorze ans, raconte. Un roman qui commence donc très brutalement et qui met clairement en avant la responsabilité de la police française dans le cadre de ces arrestations massives. Le cas indéniable d'une collaboration totalement acceptée et voulue par le régime de Vichy et qui terrifie les Parisiens qui s'aperçoivent qu'ils ne peuvent même plus compter sur leur police. Sarah décrit les conditions de détention dans le Vélodrome d'Hiver par une chaleur insoutenable. Et avec beaucoup de courage, l'adolescente et sa mère parviennent chacune leur tour à s'enfuir. Une police française qui continuera de les traquer et qui les arrêtera une seconde fois avant de les remettre aux nazis.
La déportation au camp de Birkenau-Auschwitz
Une fois livrées aux nazis, en mai 1944, Sarah et sa mère sont déportées à Birkenau-Auschwitz. Agée de seize ans, Sarah poursuit son terrible récit. Toutes deux sont arrivées en enfer et le destin fait qu'elles échappent aux chambres à gaz.
C'est un quotidien absolument horrible, purement inhumain mais c'est un quotidien qu'il est indispensable de raconter pour soi, pour s'assurer qu'on est toujours vivant et pour les autres.
Le devoir de mémoire
Roman sur la Shoah, Vous ne nous séparerez pas de Régis DELPEUCH œuvre au devoir de mémoire et Sarah l'affirme elle-même dans son récit. L'indicible doit être pourtant dit, pour que toutes les générations actuelles et à venir sachent ce qu'il s'est passé, ce que tant de gens ont enduré, pour que de tels actes ne puissent plus jamais se reproduire. L'auteur s'est appuyé sur les souvenirs de Sarah et une solide documentation pour retracer son vécu. Il restitue avec force et émotion ce qu'elle et sa mère ont enduré pendant ces années de guerre, de traque et d'enfer.
Complété par un dossier En savoir plus, le roman fait suite aux nombreux témoignages que Sarah a délivrés aux jeunes dans les collèges et lycées.
Par son titre très évocateur, Vous ne nous séparerez pas est poignant et, même s'il est dur, il est indispensable pour connaitre la réalité de notre histoire contemporaine.