Franziska "Sarah" Mangold a 11 ans en 1939. Son entourage la surnomme Ziska. Elle vit avec ses parents à Berlin. Bien que sa famille soit d'origine juive, celle-ci s'est convertie au protestantisme depuis deux générations.
Quand Hitler arrive au pouvoir et commence à instaurer des mesures antisémites, Ziska et ses parents pensent tout naturellement ne pas être inquiétés. Mais c'est bien mal connaître les Nazis... Alors que les parents de Ziska attendent les derniers papiers pour partir en Chine, ils sont violentés par les Nazis sous les yeux de la petite fille. Son père est même emmené et il est interné à Sachsenhausen, un camp de concentration proche de Berlin. Ziska décide de prendre la fuite en passant par la fenêtre de sa chambre. Quelques temps plus tard, elle retrouve sa mère chez sa meilleure amie. Mais elles ne peuvent pas rester là, il leur faut se mettre en sécurité. En attendant, elles sont recueillies par tante Ruth, oncle Erik et leurs deux filles. Cette situation reste temporaire. Ziska apprend alors que Bekka s'est inscrite au Kindertransport (transport d'enfants) qui permet de faire passer des enfants juifs en Angleterre. Refusant d'abandonner sa famille dans un premier temps, Ziska est convaincue par sa mère de faire de même. La jeune fille accepte finalement, et c'est elle qui est justement choisie pour partir. Bekka est contrainte de rester à Berlin. A Londres, Ziska est recueillie par la famille Shepard, des juifs orthodoxes. Ziska devient alors Frances et elle est très vite intégrée à sa nouvelle famille. Parvenant à maintenir le contact avec sa mère, elle apprend que celle-ci, sa tante, son oncle et ses cousines ont du partir en Hollande pour fuir la menace nazie. Frances entreprend de nombreuses démarches pour permettre à ses parents de la rejoindre mais sans succès.
Cependant, la guerre éclate en Europe et l'Angleterre est elle aussi touchée par les bombardements, la mort.
L'avis d'Histoire d'en lire
Après le magnifique roman Mes deux Allemagne, Anne-Charlotte Voorhoeve nous offre un nouveau texte d'une très grande force. Bien qu'elle aborde la Seconde Guerre mondiale et les persécutions contre les Juifs, l'autrice a choisi un titre résolument positif : Vis, et sois heureuse, Ziska ! En résumé, malgré le danger, la mort, les difficultés quotidiennes, vis et survis !
Franziska Mangold, connue sous le nom de Ziska ou de Frances est donc la narratrice de ce récit. Elle le commence alors qu'elle n'a que 11 ans et le termine quand il a 17 ans. Cette guerre représente un grand pan de sa vie, son enfance et son adolescence qui lui sont volées par le régime nazi. Ziska nous fait part de son vécu personnel, celui de ses proches mais aussi de manière plus générale de ce qu'il se passe en Allemagne et en Europe. Le lecteur peut ainsi mieux recadrer les événements.
Le roman est divisé en trois grandes parties : 1938-1939 / 1939-1940 / 1941-1945. Chaque partie correspond à une étape importante pour Ziska : sa vie alors qu'elle est encore en Allemagne / ses premiers temps en Angleterre / son intégration dans la famille anglaise mais surtout la guerre en Europe qui détruit tout.
Ziska grandit pendant toutes ces années et son discours s'affirme, mûrit. L'autrice a su parfaitement retranscrire cette évolution par le vocabulaire, les tournures de phrases, la densité même de ce que raconte Ziska. On sent à quel point les émotions et sentiments de la jeune fille s'enchevêtrent les uns aux autres. Alors qu'elle refuse de quitter ses parents, elle ne veut plus non plus se séparer de sa famille adoptive au final. Elle hésite entre sauver sa vie ou se sacrifier mais rester avec ses proches. Ses sentiments envers les garçons sont confus également.
Ce qui ressort de tout cela, c'est que Ziska est une fille très courageuse, dévouée et en même temps extrêmement sensible. Elle a besoin de se sentir épaulée, soutenue et les personnages qui gravitent autour d'elle sont toujours là pour ça, l'aidant ainsi à faire les meilleurs choix.
Tout au long de ces années, Ziska souffre profondément car sa famille et ses amis sont directement touchés par les crimes nazis. Elle souffre aussi d'être vivante alors que les autres n'ont pas survécu. Ce roman est absolument bouleversant, touchant. Et Anne-Charlotte Voorhoeve retisse une toile de fond historique des plus détaillées avec les convois d'enfants, les persécutions contre les Juifs, la montée du nazisme en Allemagne, le quotidien en temps de guerre en Allemagne et en Angleterre plus particulièrement. Cela reste même rare qu'un tel roman nous soit proposé par une autrice allemande ! Les romans jeunesse sur la Seconde Guerre mondiale et la Shoah sont davantage connus grâce aux auteurs français. Ici, Anne-Charlotte Voorhoeve assume pleinement l'histoire de son pays et nous offre un autre regard.
Un véritable chef d’œuvre qui nous est transmis grâce à la traduction de Florence Quillet, qui avait également traduit Mes deux Allemagne. Un duo qui fonctionne donc à merveille !