Violette Lecoq est âgée de tout juste trente ans lorsqu'elle est arrêtée en août 1942. Infirmière, elle a aussi intégré un réseau de résistance. En octobre 1943, Violette est entassée, comme des centaines d'autres femmes, dans un wagon à bestiaux. Elle est déportée vers le camp pour femmes de Ravensbrück.
Ses compétences d'infirmière lui valent d'être transférée au block 10 où agonisent de nombreuses femmes. Tant bien que mal et avec l'aide de co-détenues, Violette tente de faire l'impossible. Elle peut compter sur le soutien de la médecin Louise Le Porz et de la résistante Jacqueline Héreil.
Pendant toute sa détention au camp, elle veut garder une trace des horreurs subies dans le camp, et même des victimes. Alors, elle dessine sur une gamelle, son calepin ou tout morceau de papier qu'elle trouve. Même si les responsables du camp chercheront à faire disparaître ces dessins, Violette parviendra à en sauver pour témoigner.
Citations "- J'aime dessiner.
- Je sais. Je t'ai déjà vue faire avec la suie sur la gamelle.
- Faute de crayon...
Violette glissa le papier sous sa paillasse et ferma les yeux. La chance lui sourirait peut-être le lendemain à l'atelier.
Mais elle ne trouva rien ce jour-là. Ni le jour suivant.
Au bout d'une semaine de quête infructueuse, elle se résigna à rêver en laissant courir son doigt sur la facture. Un soir où elle s'assoupissait, rompue de fatigue, la voix d'Ewa la tira de sa somnolence.
- Violette !
Un stylo à encre flottait devant son nez. Elle se redressa, incrédule. Ewa souriait, ravie de son effet.
- Où as-tu trouvé ça ? s'écria Violette.
- C'est Aneta qui l'a ramassé dehors, au retour de l'appel. Il a dû tomber de la poche d'une gardienne.
- C'est vrai ? Vous ne l'avez pas volé ?
L'expression d'Ewa s'assombrit.
- On sait très bien ce qu'on risque à voler dans ce camp. On veut vivre encore... et te voir dessiner, ajouta-t-elle avec un clin d'œil.
- Vous me donnez ce stylo ?
- À condition que tu nous fasses un beau dessin.
- Dessine, Violette, renchérit Aneta.
- C'est d'accord." p. 46-47
L'avis d'Histoire d'en lire
La collection Les Héroïques aux éditions Talents Hauts met à l'honneur des enfants, des femmes ou des hommes qui ont marqué leur époque. Catherine Cuenca a ce talent pour parler de femmes trop longtemps restées dans l'ombre. Elle retrace l'engagement incroyable de Violette Lecoq et Louise Le Porz.
Un roman hommage
Catherine Cuenca entre directement dans le vif du sujet. Si le nom de Violette Lecoq est resté dans l'Histoire, c'est parce qu'elle a survécu à sa détention au camp de Ravensbrück et a témoigné, par ses dessins, des conditions de la vie concentrationnaire.
Alors l'autrice axe son roman sur toute la période pendant laquelle Violette et Louise ont été détenues au camp de Ravensbrück, de leur transfert en octobre 1943 pour Violette et juin 1944 pour Louise, jusqu'au procès de leurs bourreaux, qui s'est tenu à Hambourg, le 5 décembre 1946.
Catherine Cuenca fait s'entrecroiser les parties à travers lesquelles on suit Violette, et celles on suit Louise, tout en avançant chronologiquement.
La narration omnisciente et au passé permet de prendre de la distance par rapport à ce que vivent toutes ces femmes, tout en étant saisis par les terribles conditions de détention.
Un total dévouement
Comme à son habitude, Catherine Cuenca a travaillé à partir d'une solide documentation et notamment à partir des témoignages de Violette Lecoq, Louise Le Porz et Jacqueline Héreil, une résistante.
Et chose exceptionnelle de ce roman, des dessins de Violette Lecoq ont été inclus et sont ainsi communiqués dans un livre pour la première fois.
Violette se sent investie d'une mission, qu'elle prend tout de suite à cœur. Malgré la souffrance, la mort, les horreurs qui l'entourent, elle sait qu'elle doit tenir, qu'elle doit rester vivante et sortir libre de ce camp pour témoigner en l'honneur de toutes ces femmes qui ont été assassinées à Ravensbrück. Les trente-six dessins qu'elle a sauvés serviront de preuves accablantes et permettront de faire condamner les bourreaux de Ravensbrück.
Violette et Louise se rencontrent au block 10, où elles ont été affectées, le 17 octobre 1944.
Avec Jacqueline Héreil, elles resteront soudées coûte que coûte.
Une trace dans la nuit est un roman poignant. Catherine Cuenca a veillé à restituer le plus fidèlement possible les conditions de vie ou plutôt de survie du camp de Ravensbrück, camp réservé aux femmes.
Des descriptions bouleversantes.