Berlin, 1940-1941. Sophie, Hugo, Magda, Jonas, Otto, Franz sont de jeunes Allemands. Adolf Hitler bouscule leur quotidien et leurs rêves en persécutant tous ceux qu'il considère comme des parasites (Juifs, communistes, malades, homosexuels) et veut un grand empire habité seulement de parfaits Aryens.
Parmi Sophie, Hugo, Magda, Jonas, Otto, Franz, certains vouent un véritable culte à Hitler, quand d'autres œuvrent en secret pour résister au nazisme et protéger les Juifs directement menacés par le régime.
L'avis d'Histoire d'en lire
Il n'est si longue nuit est la troisième partie d'un ensemble de romans que Béatrice Nicodème a écrit pour le public adolescent sur la Seconde Guerre mondiale. Ami, entends-tu... J'avais treize ans sous l'Occupation raconte le quotidien d'un jeune résistant français alors que Vous ne tuerez pas le printemps - J'étais opératrice radio en 1943 nous invite à suivre le personnage d'Elaine, une anglaise agent des services secrets. Ici, il est question de six jeunes Allemands au cœur de l'Allemagne nazie entre rêves et désillusions.
Sophie, Hugo, Magda, Jonas, Otto et Franz ont des personnalités et des points de vue très différents. Il y a ceux qui soutiennent totalement le parti hitlérien comme Otto, d'autres qui résistent dans le plus grand secret comme Hugo, Jonas ou plus tard Sophie. Il y a celle qui est prise au piège de la Gestapo (Magda) et celui qui tente de se consacrer pleinement à sa passion pour la musique pour éviter d'être rattrapé par la noirceur ambiante (Franz). Ces six personnages en viennent à se croiser pour certains, parfois pour s'entraider, partager le même combat, parfois pour nuire. Mais comment savoir à qui faire confiance dans un climat si tendu et délétère ? La menace est permanente et pèse sur chacun des protagonistes et plus généralement sur tout ceux qui vivent en Allemagne. Les arrestations et déportations de Juifs se multiplient et toute action ou parole contraire au régime peut valoir la mort. Une partie de la population est même incrédule face aux rumeurs qui concernent les camps de détention d'où personne ne revient jamais.
Béatrice Nicodème a su mettre en scène des personnages très aboutis, aux psychologies parfaitement façonnées, s'appuyant sur le vécu de jeunes hommes et jeunes femmes ayant réellement existé, comme précisé en toute fin de livre.
"Il n'est si longue nuit qui n'atteigne l'aurore" est une citation de William Shakespeare dans sa pièce Macbeth, donnant en partie son titre à ce roman. Chaque jour, chaque nuit s'étire dans l'angoisse du lendemain. A sa manière, chacun prend des risques pour lutter de l'intérieur contre le nazisme. Un régime nazi qui traque sans relâche les Juifs, les opposants, les malades, comme il le fait dans les territoires occupés comme la France. Peut-être la menace est-elle encore plus pesante dans le pays directement dirigé par Adolf Hitler, où chacun peut devenir un espion, un délateur.
La forme du roman choral permet de croiser les destins des six personnages. Et pour une fois, l'autrice n'a pas choisi la narration à la première personne pour chacun d'eux, elle reste sur un discours omniscient centré sur le personnage introduit par le titre de chapitre, tout en le faisant évoluer dans un Berlin et une atmosphère parfaitement reconstitués. La fluidité de l'écriture facilite le passage d'un personnage à l'autre et très vite, les interactions se multiplient entre chacun, accroissant le suspense qui planait déjà.
Il n'est si longue nuit est un roman fort, dur aussi mais tellement ancré dans la réalité. Un roman rare au cœur même de l'Allemagne nazie et du lieu du pouvoir.