Élisabeth est d'origine bretonne et elle est orpheline. Sans le sou, elle décide d'aller à Paris, avec pour seul bien en poche, la photo de ses parents. En 1920, la guerre est finie depuis plusieurs mois mais elle marque encore les lieux et les gens. La fillette trouve refuge au 6e étage d'un immeuble bourgeois, dans une chambre de bonne. Sauf que cet immeuble est envahi de Schmolls. Mais Élisabeth ne craint rien !
Citations "Élisabeth fouille un moment dans sa chaussette, et en sort une vieille photo. Dessus, il y a une jeune femme et un jeune homme. Ils semblent beaucoup s'aimer.
- C'est qui, ça ?
- Mon père et ma mère. Ils sont beaux, non ?
- Très beaux. Surtout ta mère... Tu les recherches, ou un truc du genre ?
- Non, ils sont morts. Pendant la guerre. Enfin, je crois. Sinon, ils ne m'auraient jamais laissée à l'orphelinat, ils seraient venus me chercher...
- C'est sûr !
- C'est sûr... Tiens, regarde, derrière la photo, y a une adresse. C'est bête, mais je me suis dit que j'allais y aller. De toute façon j'ai plus rien, alors, ça ou autre chose..." p. 20
L'avis d'Histoire d'en lire
C'est un plaisir de retrouver Vincent Cuvellier du côté des romans historiques pour la jeunesse !
Avec Élisabeth sous les toits, direction Paris, en 1920, au moment de ce qu'on a appelé les "années folles".
Déambulation parisienne
On pourrait se demander pourquoi Vincent Cuvellier a choisi d'ancrer son récit à cette époque ? Il est vrai que la littérature jeunesse aborde encore assez peu l'après Grande Guerre, alors qu'il y a justement beaucoup à en dire.
Alors la jeune Élisabeth, âgée de 10 ans, va être notre guide. À ses côtés, nous débarquons de la Bretagne et découvrons l'immensité de Paris. Orpheline, elle n'a, en poche, qu'un début de lettre, une photo de ses parents et une adresse, et part à leur recherche.
Alors que ses premières rencontres l'amènent vers des clochards de Paris, Élisabeth doit aller vers les beaux quartiers. Grâce à la fillette, on passe donc facilement des quartiers populaires aux rues bourgeoises, tout en faisant halte aux Halles (le ventre de Paris) ou un passage par Montmartre, les Champs-Élysées avec l'Arc de Triomphe et la tombe du soldat inconnu.
Une petite carte du Paris de l'époque en début de livre aurait été bienvenue pour situer ces différents lieux.
Et puis, Vincent Cuvellier développe le contexte historique de l'époque.
La guerre est terminée depuis moins de deux ans et les stigmates sont encore nombreuses. Beaucoup d'hommes ont péri sur le front et ceux qui ont pu en revenir sont parfois gravement blessés, comme le Fendu ou Blaise Cendrars.
Et dans le même temps, la grippe espagnole ravage la population, touchant autant les hommes, les femmes, les enfants, riches ou pauvres.
Élisabeth se lie facilement d'amitié avec tout ceux qui croisent sa route : le Fendu, Jérôme et Pascal bien sûr ; le poète Blaise Cendras qui fréquente Modigliani et Picasso. Entre personnages fictifs et ceux qui ont réellement existé (jusqu'à un passage du Président de la République de l'époque, Paul Deschanel), on découvre une ville en pleine renaissance, après les désastres de la guerre et de la pandémie.
L'art se renouvelle et la java fait danser tout le monde.
Quête et fantastique
Et puis, ce roman n'est pas que l'histoire d'une déambulation au coeur de la capitale. Si Élisabeth est là, c'est parce qu'elle recherche ses parents, avec peu d'indices en poche.
Avec sa petite bouille toute gentille, la fillette attire vite la sympathie, même de la part de ceux qu'on catégoriserait plus vite du côté des méchants. C'est bon enfant, le récit est porté par une écriture légère, avec des touches d'humour.
Et le fantastique a aussi son rôle, avec les Schmolls, ces drôles de créatures qui se nourrissent de la détresse humaine ou encore le jeune Louis, un fantôme que seule Élisabeth parvient à voir.
Élisabeth sous les toits est un récit dense (un peu plus de 300 pages) et joliment illustré en noir et blanc par Guillaume Bianco. Le mélange des genres aventure-historique et fantastique fonctionne très bien et la fin nous laisse à penser qu'il y aura une suite !